En 1963, dans le cadre de mon cursus, j’ai réalisé une étude sur notre commune. Le Louannécain Edouard Ollivro, maire de Guingamp et professeur d’Histoire et Géographie – il deviendra député en 1967 – m’avait conseillé dans la façon de structurer mon plan. Cette monographie me sert aujourd’hui de point de départ pour évaluer l’importante évolution qu’a connue Louannec en un demi-siècle. Que représentait Louannec, il y a une cinquantaine d’années ? C’était une commune rurale de 1100 habitants à vocation agricole. Elle était connue pour avoir un maire, Pierre Bourdellès, conseiller général et député. Pour avoir un foyer rural très fréquenté par la jeunesse trégorroise lors de bals animés par des orchestres de renom. Et pour avoir une équipe de football, Louannec-Sports, qui commençait à vivre sa trentaine d’années glorieuses. Et puis, c’est tout… Aujourd’hui, Louannec avec ses 3200 habitants est une commune semi-urbaine. La composition de sa population, dans sa structure socioprofessionnelle, a été complètement chamboulée. La grande perdante dans cette modification est la tranche agricole. Les terres se sont concentrées dans quelques mains ; les techniques de culture et d’élevage se sont modernisées. Dans le même temps, on a assisté à l’arrivée de nombreux cadres supérieurs dont la majorité travaille dans « la haute technologie de la Trégor Valley ». Les plus de 60 ans, les retraités, représentent 36% de la population…
POPULATION NOUVELLE, ÉPOQUE NOUVELLE
UNE POPULATION QUI A TRIPLÉ : ON PASSE DE 1100 à 3200 habitants !
En 1964, on dénombre 1073 habitants à Louannec. C’est le chiffre le plus bas recensé à ce jour, le premier recensement ayant été fait au lendemain de la Révolution de 1789. Aujourd’hui, on compte le triple d’habitants.
Dans un premier temps, cet apport de population est lié à l’industrialisation de Lannion qui commence au début des années 60. En effet, dans le cadre de la décentralisation, prônée par le Général de Gaulle, président de la République, le gouvernement dote Lannion du CNET (Centre National d’Etudes des Télécoms) et Pleumeur-Bodou, avec le Radôme, capte la première liaison par satellite le 11 juillet 1962. C’est l’acte 1 de la Mondiovision.
Le choix du site de cette nouvelle zone industrielle a été souhaité et guidé par le Lannionnais Pierre Marzin, haut fonctionnaire des postes et télécommunications. Ce qui vaudra à ce haut fonctionnaire de devenir par la suite sénateur-maire du Grand Lannion. Grand Lannion, disait-on alors, parce qu’il a fallu que la ville s’agrandisse en absorbant Brélévénez, Servel, Loguivy et Buhulien pour disposer de terrains nécessaires à l’installation des nouvelles usines. Parallèlement, l’enseignement supérieur s’implante à Lannion avec l’ouverture de l’IUT ( Institut universitaire de technologie) et de l’ENSAT ( Ecole publique d’ingénieurs formés à la recherche et à la haute technologie)
Arrivent aussi des sociétés annexes comme Alcatel, la SAT, la SOCOTEL. Ce sont des milliers de personnes qui viennent travailler dans ces usines et qui, par ricochet, contribuent à faire de Louannec une cité qui prend de l’ampleur.
Dans les faits, cette croissance se traduit en premier lieu par la construction de nouvelles cités : celle de Villeneuve en 1963, celle de Carlouer en 1964, celle de Saint-Yves en 1970, celle de Croaz Nevez en 1972 et celle de Mabiliès en 1974. Louannec compte alors 2.200 habitants.
Ce qui peut paraître paradoxal, c’est que cette dynamique démographique ne se dément pas alors qu’elle aurait pu être freiné par deux phénomènes : le départ des jeunes Louannécains vers d’autres métropoles et la crise de l’emploi sur le plateau lannionnais dont ont été victimes les opérateurs et les opératrices. Comme en cette année 2002 où Alcatel liquide 1.500 emplois…
La guerre 14-18 avait été lourde en pertes humaines (25 tués au champ d’honneur par an pendant quatre ans). Elle avait en une incidence sur la courbe démographique. Eh bien, depuis trente années, c’est à peu près à ce rythme, que les jeunes scolarisés à Louannec partent. Certes, ils ne sont pas morts mais ni ces jeunes ni leurs enfants ne figurent plus dans les statistiques INSEE de la commune !
DIAPORAMA
Jean Nicolas, quatre mandats de maire, explique le pourquoi de cette croissance démographique : « Louannec a de nombreux atouts : la proximité de Lannion et de Perros-Guirec, une fenêtre sur la mer, une vie associative dense, des terrains à un prix abordable. A mes permanences, chaque matin, j’ai accueilli à la mairie beaucoup de jeunes couples d’ingénieurs, des dizaines et des dizaines de personnes qui ont connu la commune en venant l’été dans notre camping. Par moments, je ne savais que faire des gens qui venaient me voir et qu’il fallait loger… Tout ce monde est venu se greffer à la population existante jusqu’à franchir le cap des 3000 habitants pour lesquels, bien sûr, nous avons réalisé de nombreux lotissements. ».
Pour satisfaire une demande incessante, la municipalité encourage et se lance dans la construction de lotissements « haut de gamme » qui sortent de terre comme crocus au printemps : Clos des Chênes (10 lots + HLM, 1994), Jacques Cartier (13 lots, 1994), Kernasclet (17 lots, 1996), Goascabel (25 lots, 1998), Park Uhellan (15 lots, 1999), Ty Pors (8 lots, 2001), Jardellec (18 lots, 2002), Kermeur (11 lots, 2002), La Vallée (16 lots, 2003), Penker 1 (43 lots, 2003), Penker 2 (61 lots, 2004), Roch Gwenn Uhellan (26 lots, 2005), Kerespertz 1 (18 lots, 2006), Le Tossen (32 lots, 2006), Kerespertz 2 (20 lots, 2009), Le Croajou (3 lots, 2011), Poulajou Bihan (16 lots, 2012), Trouz ar Mor (13 lots, 2013). Il convient d’ajouter à cette liste pas forcément exhaustive des constructions émanant d’initiatives privées. En plus de la construction de maisons nouvelles, on assiste à la rénovation de nombreux corps de ferme et de « longères » qui, en temps normal, auraient été laissées à l’abandon. Ce passage du patrimoine bâti agricole dans de nouvelles mains -généralement aisées- a grandement contribué à l’embellissement de la commune. Jean Nicolas affirme que cette croissance a été favorisée par la politique mise en place par la Communauté des communes : « Joël Lejeune, le président a été un visionnaire. Il a fait beaucoup pour Lannion et pour les communes périphériques en s’engageant dans la recherche d’emplois. » Certes, la zone d’emplois de Lannion a subi une crise sévère, ses deux secteurs de pointe – électronique et télécommunications ayant été touchées. Mais, aujourd’hui, la presse spécialisée fait état d’un renouveau en termes plutôt dithyrambiques, parlant de « la mini Silicon Valley bretonne » ou encore de « la haute technologie de la Trégor Valley où foisonnent des centaines de start-up innovantes adossées aux géants mondiaux que sont Alcatel-Lucent (aujourd’hui Nokia) et Orange France Télécoms » Le mandat de Gervais Egault a commencé sous les mêmes auspices en termes de développement. Le chiffre des constructions neuves repart à la hausse avec le lancement de Poulajou Braz (51 lots).
UNE POPULATION AGRICOLE RÉDUITE À SA PLUS SIMPLE EXPRESSION : de 60 %, ELLE TOMBE À 2,6%
En 1964, on compte sur le territoire de la commune 120 exploitations agricoles. Ce secteur (exploitants + salariés) représente 60% de la population active ! Le nombre important de fermes permet à trois entreprises de battage de la commune – on dirait aujourd’hui « battages à l’ancienne » – d’offrir leurs services. Jean Le Garrec (Mabiliès), Yves Le Marrec (Pontallec) et Edouard Nicol (Le Cra) se concurrencent la clientèle sur le territoire de Louannec et dans les communes environnantes. Ils sont suivis par des « escouades » de travailleurs qui se créent par solidarité entre voisins. Les jours de battage donnent lieu à des « fricots » ou repas de fête.
Ces années-là, on recense 150 chevaux de trait à Louannec. Ce nombre est alors jugé insuffisant puisque l’élevage du cheval est encouragé. Une prime de 500 francs est offerte pour toute jument de 4 à 6 ans qui met bas. A croire, avec le recul, que les décideurs avaient des bandeaux sur les yeux pour ne pas voir venir la mécanisation. Cette incitation à accroître le cheptel chevalin sera sans suite, balayée par la mécanisation, beaucoup d’exploitants faisant l’achat d’un tracteur.
A cette même période, on compte 500 porcs. Dérisoire quand on sait que la GAEC Daniel (Kergueno) a élevé à elle seule, un temps fut, plus de 5.000 têtes ! Le nombre de bovins était évalué à 1200 soit 10 en moyenne par unité. Aujourd’hui, on compte au moins 120 laitières et autant de génisses dans chacune des GAEC qui se sont spécialisées dans la production de lait. En passant devant les deux GAEC voisines de Cabatous et de Kerallain, le promeneur découvre dans les prés d’importants troupeaux. Daniel Rolland, l’un des éleveurs, plaisante : « Ici, on est sur le plateau des Mille Vaches ! »
Petit à petit, les exploitations de taille modeste ont disparu. Ce processus irréversible a été accéléré par des mesures telles que l’IVD (indemnité viagère de départ). La tendance est à l’encouragement vers l’agriculture de groupe par la création de GAEC (Groupement Agricole d’Exploitation en Commun) si bien qu’aujourd’hui, le nombre d’exploitations se compte sur les doigts des deux mains (8 en tout et pour tout) et que la population agricole pèse moins de 3% du total de la population active ! Signe des temps : le conseil municipal qui était naguère entièrement composé de cultivateurs ou de négociants liés à l’agriculture n’a aujourd’hui aucun représentant au sein de l’assemblée communale ! Un exploitant agricole explique cette situation par la difficulté de se libérer pour assister à des réunions à des heures où la présence est nécessaire aux travaux de la ferme, pour la traite par exemple…
En 1964, le monde paysan pèse de tout son poids sur la politique locale. Sur les 13 conseillers municipaux que compte alors la commune, dix sont agriculteurs, deux sont négociants en produits agricoles et un artisan. Ce sont : Pierre Bourdellès, député-maire, Mabiliès ; Yves Saliou, Coadénec ; Pierre Colin, Kerbellec ; Yves Daniel, Kerizout ; Louis Daniel, Kerguénou ; François Nicolas, Kernasclet ; Alain Saliou, Guernabacon ; Roger Prat, Kerfanouil ; Joseph Tinévez, Le Mouster, Yves Menguy, Golven ; Amédée Le Maillot, Bourg ; Albert Le Saux, Pont-ar-Saux ; Jean Derrien, Nantouar.
Gérard Goasampis, qui a tenu le domaine de Cabatous de 1972 à 2010, a vécu en direct cette de profonde évolution. Dès 1974, il a effectué une première amélioration dans son domaine en construisant une stabulation équipée d’une salle de traite. Sa surface cultivable est alors passée de 18 à 45 hectares pour produire herbe et maïs, nécessaires à l’alimentation de son cheptel. En 2006, il s’est mis en GAEC (Groupement Agricole d’Exploitation en Commun) avec son fils Thierry et Daniel Rolland (Goasquéo). La GAEC dispose de ce fait de 170 hectares. Il y a cinquante ans, avec 20 hectares et trois chevaux, on était considéré comme le « pacha » de la commune. Les temps ont changé…
Autre pratique intéressante : le prêt de terre ponctuel. Une fois l’orge coupée, l’éleveur cède son champ pour une durée de 9 mois à un légumier qui cultive le chou-fleur, par exemple. Ce prêt présente deux avantages : primo, le primeuriste amende et améliore le sol qui sera de qualité pour recevoir la graine de maïs ; secundo, la pression foncière de la part des légumiers se fait moins forte à l’encontre des éleveurs.
Gérard Goasampis exprime le mal-être du monde paysan d’aujourd’hui confronté à la crise du lait et à celle du porc : « Avant, on vivait mieux avec 20 hectares qu’actuellement sur 200 hectares. Les prix n’ont pas évolué. Un veau de huit jours, on le vendait plus cher en 1972 qu’aujourd’hui ! En plus, nous avons à faire face aux contraintes exigées par les nouvelles normes. Ca n’arrête pas ! On est sur le point de nous demander des couvertures sur les silos de stockage des fumiers. Aurons-nous les moyens de le faire ?… »
Dans les années 50, la culture du lin est abandonnée. Pierre Saliou, propriétaire d’un teillage qui employait une quinzaine d’ouvriers à Kerscouah, déplace son activité dans la région de Caen.
ARRIVÉE EN NOMBRE DES COLS BLANCS : DE 1 SEUL ON PASSE À PLUS DE 300 CADRES SUPÉRIEURS !
En 1964, Louannec ne compte qu’un cadre supérieur – M. Stoll, éditions Jack. Les lignes ont bougé depuis. La haute technologie demande des cadres compétents si bien qu’ont afflué sur Louannec un grand nombre d’ingénieurs. On note aussi sur le territoire communal une assez forte présence de spécialistes de la santé et d’enseignants du secondaire ou du supérieur. La compétence exige un niveau d’instruction élevé si bien que Louannec se situe à la troisième place des communes du département au pourcentage de bacheliers. Autre chiffre impressionnant : le tiers de la population active est titulaire d’un diplôme de l’enseignement supérieur ! Pour conséquence : des salaires élevés qui contribuent à rehausser le niveau de revenu moyen par habitant. Louannec pointait à la première place du département en 2015 : (32 067 euros de moyenne annuelle par foyer). Un dossier paru dans le Trégor en mai 2015 précise qu’à Louannec, les 23 foyers les plus riches ont des revenus mensuels supérieurs à 20 685 euros. 65% des 1651 foyers fiscaux sont imposables et paient un impôt moyen de 3025 euros. A ce hit-parade, Louannec devance dans l’ordre deux autres communes du canton : Saint-Quay-Perros et Pleumeur-Bodou.
UNE POPULATION VIEILLISSANTE : 36% DE PLUS DE 60 ANS
Ce regain démographique après un siècle de déclin et d’exode agricole est marqué par une arrivée massive de retraités, gagnés par l’engouement que suscite le littoral. A tel point que les plus de 60 ans représentent aujourd’hui plus du tiers de la population (36%) alors qu’en 1975 les retraités n’étaient que 16%. Il est vrai que depuis 50 ans, l’espérance de vie s’est considérablement étirée : 10 ans de plus pour les hommes (de 68 à 78 ans) ; 13 ans de plus pour les femmes (de 73 à 86 ans).
Le dernier recensement, celui de 2010, n’est pas encourageant pour l’avenir. La pyramide des âges montre clairement un déficit chez les 15-29 ans au nombre de 291 alors que la tranche 60-74 ans affiche 675 personnes soit 2,3 fois plus ! Ce qui confirme la forte arrivée de retraités sur la commune. Il est vrai que des personnes qui ont fait leur carrière dans des grands centres urbains et qui vendent leur maison dès la retraite font pour la plupart une opération blanche en venant s’installer ici. Le pourcentage important de personnes âgées explique aussi le nombre de plus en plus grand de biens immobiliers à la vente sur la commune à la suite des décès.
Le revenu moyen des retraités de Louannec -36 200 euros annuels- est considéré comme élevé. Leurs ressources jointes à celles des cadres supérieurs contribuent à donner de Louannec l’image d’une commune huppée.
A la cérémonie des vœux 2016, le maire Gervais Egault a exprimé devant ce vieillissement de la population son inquiétude de devoir peut-être bientôt fermer des classes dans une école maternelle pourtant récente et très moderne. En effet, durant l’année 2015, il y a eu à Louannec 38 décès pour 15 naissances ! « C’est une raison qui nous encourage à faire venir sur la commune des jeunes couples. Dans cette optique, le lotissement de Poulajou Braz est une réussite » commente Gervais Egault.
L’ARAL (Amitié, Rencontres, Activités, Loisirs) est une association très active ouverte aux retraités. Elle a été créée en 1976 par Madeleine Porchou. Elle n’a cessé de prospérer (225 adhérents). Cette association, actuellement présidée par Carmen Laizet, organise des activités hebdomadaires (marches, informatique, belote, scrabble), des excursions, des voyages à l’étranger.
Une pyramide des âges saine a l’aspect d’une Tour Eiffel (base large et sommet effilé). Ce n’est pas le cas de Louannec où les plus de 60 ans représentent plus du tiers de la population totale. Si on compare ces deux pyramides : celle de 1976 à celle de 2010, qu’observe-ton ?
1 – Le creux des 16-29 ans (pyramide 2010) confirme l’hypothèse que nous avons avancée : le départ des jeunes scolarisés à Louannec, lorsqu’arrive le moment de trouver un emploi.
2 – Dans les strates juste au-dessus, le regain est dû à une population nouvelle appelée en majeure partie sur le bassin d’emploi de Lannion.
3 – La pyramide de 2010 fait apparaître un fort vieillissement : la frange 60-75 ans est la plus nourrie. Elle arrive en première place alors qu’en 1976 (strates sur 5 ans), les seniors n’apparaissaient qu’en 12ème position. Nous avons expliqué ce phénomène dans notre texte.
EN VRAC…
Louannec, 3900 ème commune de France au nombre d’habitants
L’âge moyen est de 43 ans.
13 605 ème commune de France au niveau superficie (13,91 km2)
La population active très équilibrée : 50,5% hommes ; 49,4% femmes.
Le pourcentage de familles monoparentales est de 6,45%
Sont diplômés de l’enseignement supérieur : 32,4%
La zone artisanale de Mabiliès est gérée par la Communauté de Communes.
En 1964, il y avait 10 artisans à Louannec. Il y a aujourd’hui 39 artisans et 29 commerces. La zone artisanale et commerciale de Mabiliès est gérée par la Communauté des communes ou LTC (Lannion Trégor Communauté). Le quartier de Mabiliès a aussi accueilli une déchetterie très bien tenue et gérée, elle aussi, par la LTC.
Le taux de chômage est de 9,1%
Le nombre d’employés communaux est passé de 5 en 1975 à 30 en 2016.
82 % des foyers sont propriétaires de leur habitation.
Les surfaces individuelles dans les lotissements sont passées de 800 m2 en 2015 à 550 m2 actuellement.
371 ménages n’ont pas de voiture ; 601 en ont une ; 666 ménages ont deux voitures ou plus et 8000 voitures traversent le bourg chaque jour.
TOPONYMIE OU NOMS DES LIEUX-DITS
Maudez Glandour, reconnu pour être l’un des meilleurs linguistes bretons, explique l’origine des noms de certains lieux-dits de Louannec. Je l’ai rencontré dans sa propriété de Keresperzh en 1976.
LOUANNEC : L’explication étymologique demeure hypothétique. Ce qui est sûr, c’est qu’on trouve dans ce mot le radical LOU suivi de deux diminutifs AN et EG. Reste donc à définir le sens de LOU. A vrai dire, ce radical se retrouve dans la plupart des langues indo-européennes. LOUAN signifierait alors ÉCLAIRÉ, LUMINEUX. Louannec pourrait donc vouloir dire LE PETIT ENDROIT LUMINEUX.
Le nom Louannec pourrait avoir une autre origine. Il serait lié à celui de Logan, un moine qui ne fut pas canonisé comme d’autres de ses compagnons venus d’outre-Manche : Guirec, Quay, Tugdual, etc… Logan se serait installé à Kerlucun (Ker Logan) et aurait rayonné sur Trélévern et notre territoire qui s’appela Logannoc pour devenir par la suite Louannec.
CABATOUS : On y voit une ferme avec un grand et beau bâtiment. Mais quel est le sens du nom ? Pour l’instant, on ne voit pas. La forme CABATOUS est pourtant bien attestée, même si dans certains répertoires anciens, elle est notée CABATOUCHE.
KERALAIN : KERALAN en breton. Petite seigneurerie qui existait déjà à l’époque de Saint Yves au 13 ème siècle puisque notre saint fit un miracle en faveur du propriétaire du domaine. Il ressuscita le fils de Keralain qui s’était noyé dans le lavoir ou dans la fontaine un peu plus bas. Tout cela ne semble pas avoir beaucoup changé depuis cette époque. La chapelle rappelle cet événement, chapelle qui a été rebâtie au moins trois fois depuis sa première édification au 14 ème siècle. Mais que veut dire Keralain ? Comme dans la plupart des cas, après KER nous avons un nom d’homme, le nom du premier propriétaire ou d’un des premiers, si bien que des noms comme Keralain remontent à fort loin, au temps où après les invasions normandes, la Bretagne rurale s’organise et se fonde (11 ème siècle). La chapelle a été reconstruite prenant sa forme actuelle en 1932-1933
KERGRIST : Le nom est simple. Et tout le monde, au premier coup d’œil, y reconnaît le mot Krist, et c’est bien cela. Les Kergrist sont fréquents. On en compte 16 rien que dans les Côtes d’Armor, sans compter la commune de Kergrist-Moelou.
KERHUADO : Ici, on supposerait volontiers KER-C’HOADO, c’est-à-dire la ferme de Le Coadou ou la ferme aux bois. Le nom de famille ou nom d’homme KOADOU, vient évidemment de KOAD, le bois.
KERLUCUN : Ce mot viendrait de Ker-Logan. Logan étant un moine qui serait venu d’outre-Manche, au 6 ème siècle, comme Guirec, Quay ou Tugdual, … Ce moine aurait exercé le pouvoir religieux et administratif sur une bonne partie du territoire qui s’appelait Lougannoc. Mot qui s’est transformé au fil du temps en Louannec…
KERIZOET OU KERIZOUT : Lorsque nous allons de Mabiliès vers Pen-an-C’hoad et Petit-Camp, nous passons à proximité de la ferme de Kerizoet, c’est en effet la graphie que nous trouvons dans le vieux cadastre. Aujourd’hui, tout le monde prononce KERIZOUT. Quelle est donc la forme correcte et que signifie-t-elle ? Kerizoet est la prononciation ancienne d’un mot qui signifie La Cerisaie, le lieu planté de cerisiers. Kerizoet remonte donc à une forme celtique KERISETUM, le lieu aux cerises. Le mot passe au Moyen-Age par la forme Kerizoet pour se prononcer aujourd’hui Kerizout.
Vous allez me dire qu’il n’y a plus de cerisiers dans le secteur. C’est exact. Qu’il y en a peu sur Louannec, et que ceux qui s’y trouvent ne produisent pas grand-chose. C’est tout-à-fait vrai. Mais cela ne veut pas dire qu’il en ait toujours été ainsi. En fait, notre climat change. Il y a encore quelques cerisiers sauvages sur Keresperz. Ils fleurissent mais ils ne donnent rien. Pourquoi ? La réponse est simple. Pour produire, les arbres à fruits à noyaux ont besoin de repos hivernal, c’est-à-dire d’un arrêt assez long de la sève dû aux glaces de l’hiver. Cela leur sert en quelque sorte de ce qu’est la taille pour les poiriers. Or nous n’avons plus de glaces d’hiver ou si peu que rien. Quand j’étais jeune, je me souviens que dans les marchés de la région, à la mi-juillet, on vendait à pleins paniers des cerises sauvages noires ou rouges, les babu. Depuis, il n’y a plus de babu. Nous payons nos hivers trop doux avec le manque de cerises.
En Bretagne, beaucoup de noms de lieux présentent une formation semblable, à savoir le nom d’un végétal suivi d’une désinence. Il y a tout un bon lot. En voici quelques-uns assez connus : HALLEGOET = le lieu planté de saules, BEZOET = le lieu planté de bouleaux, TANOT ou DANOT = le lieu planté de chênes, KOLLOT = le lieu planté de coudriers (La Coudraie), FAOUET, FOD = le lieu planté de hêtres.
KERVEGAN : Le « t » est en trop dans l’orthographe ordinaire. Encore un nom bien fréquent. Il y a 27 Kervegan ou Kerveguen, rien que dans les Côtes d’Armor. Le mot est simple ; nous avons KER plus un nom d’homme bien connu, GWEGAN, orthographié couramment comme GUEGAN. Le nom GWEGAN-GWEGEN est très vieux, il signifie l’homme de combat. Les anciens Bretons étaient volontiers des gens qui allaient guerroyer en dehors de la Bretagne au service du Roi de France ou du Roi d’Angleterre.
KERVELO : Nous avons aussi le nom noté KERMELO. Cette graphie nous indique clairement que nous avons avec MELO un nom d’homme. MAEL qui signigie Noble, Grand. Nos ancêtres prenaient volontiers des noms redondants, ils avaient conscience de leur valeur. La finale O est ici un diminutif. Rappelons que le mot MAEL lui-même est porté par les communes de Mael-Carhaix, Mael-Pestivien.
KERNU : Comme tout le monde le sait, Ker signifie : maison, villa et même ville (sans l’article dans ce cas-là). Nu, est un ancien nom d’homme, qui remonte à un dieu celtique, Nuz. Il existe également en Lézardrieux un Kernu, et plusieurs Kernu, Kernuz (dont un château célèbre) dans le Finistère.
KERVOUSTER : La maison du monastère. Quel monastère ? Il n’y en a plus de vestiges, sinon le nom. Notons qu’à l’autre bout de la commune, nous avons un autre Kervouster…
KOADENNEC : KOAD + EC = le lieu boisé. Ce qui était auparavant une seule ferme est devenu un hameau de quatre foyers. En effet, les anciennes dépendances ont été aménagées, rénovées et sont devenues surfaces habitables.
KOSKER : La bonne orthographe est Koz-kêr (Attention, le nom est féminin. En breton, on dit : ar Gozh Ker). Le sens est simple, c’est la vieille ville. En pays francisant, on trouve souvent : La Vieuxville. La formation est la même.
MABILIES : La bonne orthographe bretonne est : MABILIEZH. Le sens du mot est clair, il signifie enfantillage. Comparez le mot : mibiliach, mibiliachoù, toujours en usage , et qui signifie la même chose. Pour ce qui est du sens de Mabiliezh, veuillez vous référer à des lieux (des maisons) dénommés, La Folie, La Haute Folie, Bagatelle… Mabiloiezh a dû connaître dans les temps anciens un étrange petit pavillon de campagne qui lui a valu son nom.
NANTOUAR : Surtout ne pas orthographier avec un « h » après le « t » ! On dit en breton An Nantouar, et c’est déjà meilleur. Nous avons là la déformation d’un ancien An Landouar. Ce qui veut dire : Lann, petit monastère, établissement religieux ; douar, terre, continent. Rappelons-nous que Nantouar avait une chapelle jusqu’à la Révolution, et que le cadastre porte toujours le nom Park Ar Chapel, le Clos de la Chapelle. Ce nom nous plonge dans l’époque ancienne, où les moines qui avaient un monastère marin sur l’Ile aux Moines, avaient également un autre établissement à terre, dans la riante vallée sur la limite de la Paroisse. Etait-ce pour fuir pendant l’hiver les rigueurs des tempêtes, ou bien parce que là il y avait un petit village de pêcheurs ? Sans doute l’une et l’autre raison ont joué. Rappelons que Nantouar était au Moyen-Age un point de départ pour Saint-Jacques de Compostelle. Les pèlerins embarquaient là et devaient affronter les tempêtes du Golfe de Gascogne. Malgré cela, la voie maritime était encore plus sûre que la voie terrestre où les pèlerins avaient à affronter toutes sortes de brigands. La même appellation de Landouar se retrouve au monastère de Saint-Jacut. A Saint-Jacut de la Mer, comme ici, il désignait l’établissement monastique bâti sur le continent, par rapport aux monastères des Iles (les Iles anglo-normandes actuelles)
Et dire que devant ce phare, il y a moins de 80 ans, il y avait un jardin-potager destiné au gardien. Tout a été emporté par les flots. La falaise subit chaque année un fort phénomène érosif sous l’effet conjugué des marées et de l’écoulement des eaux pluviales.
Témoignage intéressant que celui de Serge Urvoas, professeur agrégé de géographie à la retraite : « Pour l’obtention de mon diplôme, j’ai fait un mémoire sur le littoral du Trégor de Locquirec jusqu’ au Port Blanc. Un jour que je passais à Nantouar, près du phare, je vois un os qui affleure au bord de la falaise. Une découverte qui m’intrigue beaucoup. Je pense alors faire analyser cet os par les laboratoires des services compétents… Et puis, je rencontre Jean Derrien qui habite le quartier et avec qui j’engage la conversation. Au bout d’un moment, Jean me dit : « Ca y est ! Je me souviens. Il y a longtemps, on avait enterré un cheval de Titig Trémel au milieu du champ. » Preuve évidente que la falaise avait sérieusement reculé depuis la mort de ce cheval…
Lien conduisant à la vidéo de la vente du phare par la commune de Louannec en février 1994 : http://www.dailymotion.com/video/xatjee_vente-du-phare-de-nantouar_travel
PENN-AN C’HOAD : Ce nom signifie le bout du bois.
PETIT-CAMP : Maudez Glanndour m’avait suggéré que Petit Camp voulait dire Camp Romain et que sa présence aurait été liée au Port du Yaudet qui était un centre important du temps de l’Occupation Romaine. J’ai interrogé à ce sujet l’Universitaire Jean-Yves Eveillard, historien spécialiste de cette période de notre histoire ancienne. Il a été catégorique : il n’y a aucune trace de camps romains au sens propre du terme en Armorique ni chez les Osismes qui étaient nos aïeux. Pour attester que Petit Camp a été un camp romain, il faudrait des preuves : des vestiges d’habitations, des outils, des poteries, des pièces de monnaie…
ROZMAPAMON : Ce mot vient de ROZ : colline, MAB : fils, AMON : Hamon. C’est-à-dire La colline du fils Hamon.
TRUZUGAL : A se fier à la forme actuelle du nom, cela ne voudrait rien dire : mais il est clair que nous avons ici une déformation, et que l’appellation ancienne était : TRAOUSEGAL, traou signifiant : vallon, et segal : seigle. Le vallon du seigle. Tout devient très clair, c’est-à-dire que nous avions là des champs cultivés comme aujourd’hui à côté des bois de Rozmapamon.
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EN FAISANT LE TOUR DU BOURG…
KARR-PONT : Nous sortons de l’école, mais nous ne savons pas tout. En effet, nous voici devant le KARR-PONT et nous nous demandons ce que ce mot signifie. Ce mot se compose de KARR = charrette, voiture et de PONT = pont, passage. Dans cet endroit, autrefois marécageux, au-dessus du ruisseau maintenant recouvert par la route, il y avait donc un passage allant vers le KROAJOU, un pont sans doute fait de quelques grandes pierres.
KERANGUEN : Saluons au passage KERANGUEN = la maison de Le Guen. Souvent, sur Louannec, le deuxième terme d’un nom désigne le bâtisseur ou le premier propriétaire.
GWAZH-KEO : Nous atteignons maintenant Gwazh-Keo. Ce mot n’a pas de secrets. GWAZH = ruisseau et KEO est un adjectif qui signifie creux, encaissé. C’est bien le cas. C’est toujours le même ruisseau qui a passéau Karr-PONT et qui, plus haut, longe GWAZH-KABELL.
GWAZH KABELL : Kabell est un nom de famille. Il signifie chapeau, chaperon.
POULL-FANK : Nous passons Poull-Fank (poull = mare, marécage, fank = boue). Nous saluons au passage KROAZ POULL-FANK = la Croix de Poull-Fank. Nous laissons AN GER NEVEZ (la maison neuve) à gauche et nous prenons vers la grève AN HENT NEVEZ (la route nouvelle) qui n’est plus ni neuve ni nouvelleet nous arrivons à PENN-AN-HENT-NEVEZ qui veut dire le bout de la route nouvelle.
KERESPERZH : En prenant par les champs, pourquoi pas ? Nous sommes à KERESPERZH. KER ne nous fait pas de problème, maison, villa, ville… mais ESPERZH ? Ce mot veut dire partie. Ce mot doit signifier : Domaine, propriété détachée pour une veuve.
KROAS-HENT : Le carrefour (kroaz = croix ; hent = le chemin)
CACOUZIRIS : Cacous voulant dire le lépreux, on peut dire qu’à cet endroit il y a eu autrefois une léproserie..
LE LEC’H – Dans l’enceinte de l’ancien presbytère se dresse une roche pyramidale sur laquelle on déchiffre : Desideri fili Bodognous. Ce qui signifie (La Pierre) de Désiderius, fils de Bodognous. Cette pierre, antérieure au IX ème siècle, aurait été érigée à l’endroit où ce personnage a été inhumé. Ce genre de monument funéraire est commun aux branches de la race bretonne. On en trouve au Pays de Galle, en Cornouaille anglaise et dans la zone ouest de l’Angleterre.
LE LIT DE SAINT-YVES (Goële Sant-Erwan) – Au lieu-dit Barac’h-Philippe, près de Petit-Camp, se trouve une table rocheuse sur laquelle se dessine une empreinte semblable à la trace que laisserait un coup de bêche dans un tas de sable. Ce qui a fait naître la légende. Saint-Yves qui se serait assoupi là, aurait évité de peu l’outil d’un paysan menaçant, dénommé Péron. On raconte encore que, voulant déplacer ce rocher, on aurait composé l’attelage le plus fort qui soit. Les chevaux eurent beau fournir les plus gros efforts qu’ils purent, ils n’arrivèrent même pas à tendre les liens attachés au fardeau ! Ceci rajoutant un peu plus au caractère ésotérique et sacré de cet endroit…
UN PEU D’HISTOIRE…
Du XIème au XVIIIème siècle, deux puissances ont exercé leur pouvoir sur la paroisse de Louannec.
1 – Coat-Guézennec est une propriété qui est un peu en retrait de la route qui mène de Pen-ar-C’hoad à Rospez. On n’y voit plus le colombier ni la chapelle dédiée à Saint-Sébastien. La statue tumulaire de Tristan Coetmen (15 ème siècle) a été placée dans le transept droit de l’église de Louannec. Cet enfeu représente le seigneur tel qu’il fut exposé à sa mort les mains jointes, son épée reposant sur l’armure dont il est revêtu. Le blason, avec 9 annelets d’argent 3, 3, 3, atteste que Coat-Guézennec dépendait de la
puissante famille du Vicomté de Tonquédec.
ANOMALIE…
Une rue de la commune était censée porter le nom de cet illustre Louannécain. On ne sait par quelle opération du Saint-Esprit, le nom « Coëtmen » s’est transformé en « Coëtmieux ». Ainsi donc, le vaillant chevalier trégorrois est devenu de ce fait un personnage du Penthièvre, Coëtmieux étant une localité voisine de Lamballe !
2 – On n’accède plus au château de Barac’h depuis l’interdiction faite par les nouveaux propriétaires. Ce château se trouve au bord du ruisseau de Truzugal qui descend en cascade auprès du moulin qui vient d’être restauré. Barac’h était la propriété des Tournemine. Trois d’entre eux perdirent la vie lors de la Guerre de Succession de Bretagne qui opposait Bretons du Parti de Jean de Montfort soutenu par les Anglais aux troupes françaises et bretonnes menée par Charles de Blois. Geoffroy fut tué à la Bataille de La Roche-Derrien (1347) où 5000 hommes croisèrent le fer ; Olivier mourut à la bataille d’Auray en 1364 et Jean à Pontorson en 1427.
On prête à l’un des chevaliers de Barac’h la construction de la chapelle de La Clarté (17 ème siècle). Au retour d’une croisière sur la côte anglaise, le Marquis de Barac’h qui commandait une division navale française, fut surpris derrière les Sept-Iles par une brume si épaisse qu’il était devenu impossible de gouverner. Les vents et les courants portaient sur les récifs. Il fit alors à la Vierge le voeu de construire une chapelle s’il avait la vie sauve. C’est alors, dit-on, qu’apparut le rayon de clarté salvateur…
LES CONVENANTS – On recense, à Louannec, dix lieux-dits ou exploitations agricoles dénommés Convenants : Convenant Cloarec, Convenant Ar Pors, Convenant Ar Pont, Convenant Sant-Erwan, Convenant Gorrec, Convenant Bazil, Convenant Charang, Convenant Losser, Convenant Meur, Convenant Barac’h-Philippe. Si on rejoint ces lieux-dits sur un plan cadastral, on observe qu’ils forment une ceinture à l’orée du bois de Barac’h, actuellement d’une superficie d’un kilomètre carré, soit la 14ème partie de la superficie de la commune. Il n’y a aucun doute : cette situation exprime clairement qu’il existe un lien entre ces exploitations et la Seigneurerie de Barac’h, qui exerçait son pouvoir sur la paroisse de Louannec et bien au delà (Kermaria-Sulard, Trélévern, Rospez, Brélévenez, Trézény, Lanmérin, Buhulien et une partie de Lannion).
En effet, le CONVENANT était au Moyen-Age un mode de fermage particulier au Trégor, mode de fermage qui s’est ensuite appliqué à la Bretagne bretonnante. On disait ce contrat régi par le système de la « quevaise ». Pourquoi cette pratique ? Le Seigneur, on le sait, a pour mission de guerroyer. N’oublions pas le Saccage de Lannion en 1346 suite à la trahison des gardes, la Bataille de la Roche-Derrien (20 juin 1347), le lieu-dit Pont-ar-Saux à Louannec en souvenir d’une escarmouche ou d’un combat contre des Anglais. Occupé par ses occupations nobles de chevalier et de guerrier, le Seigneur délègue en quelque sorte. Il confie des terres en établissant un contrat ou convention (d’où le nom de Convenant). L’avantage qu’il en retire en premier lieu, c’est qu’à son retour sa suite et lui-même sont assurés de subvenir à leurs besoins en nourriture. Le convenancier lui devra trois gerbes sur vingt de chaque récolte : avoine, orge, seigle, froment, blé noir, lin. Il fournira aussi navets et fèves. Autre aide venant du convenancier : l’agrandissement de l’espace cultivable. Le paysan défriche les bois (essartage) ou brûle les landes (écobuage) pour donner place à de nouvelles récoltes. On peut donc penser que la forêt de Barac’h était beaucoup plus étendue qu’elle ne l’est aujourd’hui. Le Convenant stipule que le foncier (la terre) appartient au Seigneur ; les édifices (maison, granges) et superfices (tout ce qui est au-dessus du sol : plantes, arbres, talus) appartiennent au paysan. C’est pourquoi le convenancier se met à bâtir des talus pour disposer de bois nécessaire pour le chauffage, l’hiver. Lorsque vous rencontrerez des talus à soubassements en pierres, sachez que vous êtes en présence de talus très anciens, le plus souvent érigés à la demande de familles puissantes. Pour celles-ci, la main d’oeuvre était gratuite, les travaux étant réalisés sur le compte des journées corvéables.
LE PIGEONNIER – Tout près du château de Barac’h se trouve un pigeonnier ou colombier. Cette construction qui abritait des centaines de pigeons avait une quadruple fonction :
1 – Rôle de garde-manger. C’était un complément en viande à une alimentation essentiellement composée de céréales.
2 – Rôle de transmission d’informations. C’est un service de poste effectué par les pigeons voyageurs.
3 – Rôle d’enrichissement des terres. La colombine ou fientes de pigeons est reconnue pour être un engrais de qualité.
4 – Rôle thérapeutique. La colombine sous forme de cataplasmes était censée avoir des vertus pour soigner certaines maladies. 1371 : Guillaume de Kerimel, chevalier de la paroisse de Louannec, est témoin au Procès de Canonisation de Charles de Blois.
LES MOULINS – Par le passé, il y avait huit moulins à Louannec : moulins à farine ou teillages de lin. Parmi ceux-ci, il y avait un moulin à vent à Kerjean.
L’ÉGLISE ACTUELLE – Elle a été construite de 1896 à 1898 d’après les plans de l’architecte Ernest Le Guerranic à l’emplacement de l’église primitive qui datait du XI ème siècle… Si la tour n’est pas surmontée d’une flèche, ce serait parce qu’entre temps avaient été dessinées les cartes marines. Et comme le clocher servait d’amer ou de repère pour la navigation, il n’était plus possible de mener la construction plus en avant. Cette version ne convainc pas tout-à-fait Serge Urvoas, professeur agrégé d’Histoire et de Géographie : « Regarde, me dit-il, à Kermaria-Sulard, à Rospez, à Penvénan, l’église est comme celle de Louannec, sans flèche. C’est que dans la deuxième moitié du 19 ème siècle, la culture du lin qui était la richesse du Trégor a été concurrencée par l’industrie du coton. Il s’en est suivi une crise économique. Donc moins de richesses, donc des coupes sombres dans les budgets alloués à la construction des églises ».
Ceci s’est confirmé à Louannec puisque dans le dernier procès-verbal, le Recteur de la paroisse, Joseph Allain (1893-1900), se plaint d’avoir été obligé de mettre de ses deniers pour financer le dallage de la nef et des transepts. Vous êtes-vous aussi demandé pourquoi sur le haut de nos clochers c’est un coq qui sert de girouette ? J’avais toujours pensé : coq emblème de la France. Eh bien non ! Le coq, comme le Messie dans la religion catholique, symbolise le passage des ténèbres à la lumière. Cette coutume ne date pas d’hier puisqu’elle a été instaurée par une « bulle » du Pape au 12 ème siècle… Concernant le mobilier de l’église, on retiendra surtout la chasuble dite de Saint-Yves, la statue tumulaire de Tristan de Coëtmen, sieur de Boisguézennec, (dans le transept droit), une chaire due à l’atelier Le Merrer, les vitraux modernes réalisés par les ateliers Champigneulle.
Une toile représentant « Jésus chez Marthe et Marie », oeuvre de Henry Scheffer (1842). Sa fille Cornélie épousa Ernest Renan en 1856.
Diaporama Eglise + son des cloches : https://www.youtube.com/watch?v=ySW3ltP9nGo
ON DISAIT « CHEMIN DE MESSE »…
Encore en 1880, quand on voulait se rendre de Pont-Couënnec au Bourg de Louannec, il fallait passer par Kernu et le Croajou si on conduisait un attelage. Les piétons, eux, passaient au plus court, notamment quand ils se rendaient de Kernu aux offices religieux de leur paroisse. Ceci est confirmé par l’article du Lannionnais que nous avons publié : Sieur Lissillour se rendait à vêpres à Louannec quand il intervint pour sauver de la noyade trois adolescents imprudents.
Le jour du Centenaire de la mort d’Ernest Renan, il m’a été confirmé que la propriété de Rosmapamon allait jusqu’à la mer. Preuve qu’il n’existait à l’époque aucune route le long du Lenn et que le chemin qui descendait du bourg se terminait en cul-de-sac à hauteur de la rivière Truzugal et du Moulin.
Il est alors question d’ouvrir à nouveau une partie de ce sentier. Ce qui devrait se faire lorsque le lotissement Svilaritch sera construit…
L’ANCIEN PRESBYTÈRE : QUELLE BELLE BÂTISSE !
L’ancien presbytère est aujourd’hui la propriété de Patrick et Marie Stoll. C’est une très belle bâtisse qui date de 1740. Le dernier habitant des lieux aurait été le Recteur Jean-Baptiste Guégou. Son successeur l’Abbé Le Floc’h, alias Maudez Glanndour, eut assez vite l’autorisation de l’Evêché de s’installer à Kerespertz où Mademoiselle Madeleine Saint Gal de Pons (1907 – 1994) faisait office de gouvernante. L’Evêché avait posé ses conditions à l’Abbé Le Floc’h : Vous pouvez quitter lieux mais vous aurez obligation de prendre au minimum un repas par semaine dans le presbytère ! Ce qu’il fit le jeudi midi…
Quand cette propriété fut mise en vente, Marie Stoll en eut un véritable coup de cœur, un coup de foudre même : « J’avais toujours pensé que cette maison nous était destinée ! Dans le grenier de la petite maison, il y avait un mur peint en blanc sur lequel le Recteur projetait des films. Je me souviens que les huisseries et le fenêtres étaient couleur sang de bœuf, que les poutres de la cuisine étaient noires de suie et de graisse !». Le rêve est devenu réalité. Mais il a fallu sortir vainqueur d’un marché sur lequel s’était aussi alignée la commune qui avait des visées sur les lieux pour y aménager des logements sociaux. La commune aurait proposé le franc symbolique, la famille Stoll aurait mis la somme demandée sur la table…
Ce bâtiment a été restauré avec énormément de goût. Dans le jardin attenant, le corps de bâtiment qui fut anciennement écurie et remise, a été aménagé en habitation. Je n’étais pas rentré dans cette propriété depuis 1963. J’y étais venu photographier le lech qui a été depuis installé dans le transept droit de l’église, tout près de l’enfeu de Tristan de Coëtmen…
CURIOSITÉ
J’ai posé la question sur un site Facebook : « Quel était l’usage de cette pierre calée à l’extérieur du mur du cimetière sur laquelle repose actuellement une vasque ? ». Il y a eu une multitude propositions fausses avant que n’émerge – longtemps après – la réponse exacte. Donnons donc tout de suite la clef de cette énigme.
Dans les années 50, cette pierre servait d’estrade au secrétaire de mairie, Yves Crocq, qui venait à la fin de la grand-messe, apporter un certain nombre d’informations aux habitants de la commune : publication des bans
de mariage, dates des vaccinations, des différentes élections, du conseil de révision pour les conscrits, des convocations au stage de présélection militaire à Guingamp ou « trois jours », des journées de coupe du goémon, etc… Le crieur public avait une assistance importante parce qu’à l’époque l’église était pleine tous les dimanches. La pratique religieuse était inscrite dans l’emploi du temps de tout un chacun. Le clergé exerçait encore un pouvoir très fort. Le Recteur dénonçait et citait dans son prêche les cultivateurs qui étaient allés au champ le dimanche précédent ! Il n’était pas question de manger de la viande le vendredi. Ce n’est pas, à mon avis, que les gens étaient plus croyants qu’aujourd’hui. La sortie du dimanche leur permettait à nos aïeux de rencontrer leurs amis, de parler des récoltes et des faits divers qui rythmaient la vie de la commune. Et de boire un canon, plutôt deux, après avoir écouté les informations religieuses et les informations municipales
UNE STATUE DE SAINT-GUIREC, EN BOIS POLYCHROME, AU PARCOURS MYSTÉRIEUX…
CHAPELLE SAINT-GUIREC
De cette chapelle entre Goaridec et Convenant-ar-Pont, on ne voit plus que quelques pans de murs dans les broussailles. On y a trouvé une statue polychrome de Saint-Guirec à qui cette construction était sans doute dédiée.
CHAPELLE DE COATGUEZENNEC…
Pas loin de cette chapelle d’où serait issue cette statue, il y avait une autre chapelle, celle de Coatguézennec, appelée encore dans certains actes Boisguézennec, dépendante de la Seigneurerie de Tonquédec. Cette construction a aussi disparu mais quand fut reconstruite l’église de Louannec entre 1896 et 1898. on récupéra l’enfeu ou statue mortuaire de Tristan de Coëtmen. Cet enfeu se trouve dans le transept droit de l’église actuelle.
CHAPELLE DU VOUSTER…
Disparue elle aussi. « Vouster » signifie « Monastère ». Il était donc tout à fait normal qu’il y ait là une chapelle. Nous avons retrouvé dans l’encadrement de la grange de Laurent Madec, producteur de primeurs, des pierres moulurées dont l’origine ne fait aucun doute…
CHAPELLE DE NANTOUAR…
Il n’en reste aucune trace si ce n’est une preuve écrite sur les anciennes cartes : Park ar Chapel ( Le Champ de la Chapelle) annexée, elle aussi à un monastère. Un monastère qui aurait été occupé par les moines des Sept-Iles qui auraient préféré, à la mauvaise saison, prendre leurs quartiers d’hiver sur la terre. Et être au plus près d’une population de Lougannog (Louannec) qu’il fallait christianiser… Pas très sérieux, nos aïeux, disait-on ! Nantouar était aussi un point de départ, par bateau, pour les pèlerins qui se rendaient à Saint-Jacques de Compostelle. Notons que ce pèlerinage est revenu au goût du jour avec l’explosion du nombre des randonneurs…
CHAPELLE DE KERALLAIN…
Celle-ci existe toujours. Elle a été érigée vers 1350, restaurée en 1655 et 1874. Elle a été rebâtie pour la quatrième fois « par la piété des prêtres et des fidèles de Louannec l’an du Seigneur 1933 ». Les paroissiens de Louannec sont restés fidèles à la mémoire de Saint-Yves, le patron de leur paroisse, qui, dit-on, a ressuscité un enfant qui s’était noyé dans la fontaine…
CHAPELLE DE GUERNABACON…
Guernabacon est un manoir qui se trouve sur la droite quand on file de Mabiliès direction Lannion. Le dernier exploitant de cette ferme a été Alain Saliou. On remarque toujours auprès de la grange ; à gauche en rentrant une très belle pierre sculptée, vestige de cette chapelle que était dédiée à Saint-André..
CHAPELLE DE BARAC’H
Il y avait forcément une chapelle dans ce château. Quand Yves Héloury est nommé recteur de Louannec en 1292, l’évêque de Tréguier est Monseigneur Tournemine. On dit que celui-ci réside plutôt dans son château de Louannec plutôt que dans la ville épiscopale de Tréguier. C’est aussi un Marquis de Barac’h qui fit construire la chapelle de La Clarté au XVI ème siècle.
BÂTIMENT ÉCOLE DIWAN – Cet ensemble abritait une école primaire catholique de jeunes filles. L’enseignement était dispensé par des religieuses. L’une d’elles exerçait aussi les fonctions d’infirmière. C’est dans une de ces pièces, appelée dispensaire, qu’on allait se soumettre à l’épreuve très redoutée des séances de vaccinations ! On en sortait le plus souvent avec une épaule ankylosée et des douleurs à peine supportables pendant trois jours… Lors de la terrible épidémie de grippe de 1950, cette religieuse-infirmière a utilisé sa bicyclette personnelle pour se rendre au chevet des malades de la commune. Une délibération du Conseil municipal de l’époque évoque l’achat d’un vélomoteur à son intention…
DEUX FEUX OU PHARES
Ils guidaient les marins et les navigateurs pour rentrer dans le port de Perros-Guirec.
LA FALAISE MORTE DE NANTOUAR
Dans les années 70, j’ai sillonné la commune avec Jean-Pierre Pinot, professeur agrégé de géologie à la Faculté de Brest. Ce Lannionnais recensait tous les calvaires et toutes les croix. Il les situait, les dessinait, notait leurs caractéristiques : mensurations, forme, etc… Il m’a dit que Nantouar était connu des géologues du monde entier pour sa falaise morte. C’est-à-dire qu’à la fin de l’ère quaternaire, la mer venait jusqu’au versant abrupt que l’on voit derrière les maisons sur notre droite quand l’on va à Trélévern. D’où le nom de « falaise morte », pour en savoir plus : google + louannec + falaise morte. Il m’a montré près de la cale de Pen An Nen Nevez, les restes de glaciers datant de la même époque. Il m’a expliqué que, si la flèche de galets du Kinn existe, c’est parce que le courant de la rivière de Truzugal faisait obstacle au sable et aux galets qui, sinon, auraient été au niveau de la route départementale.
Ces propriétés se sont établies, à Nantouar, au pied de la falaise morte dont le flanc est boisé.
On peut douter de l’efficacité de l’enrochement pour éviter le recul de la falaise. Sur cette photo, on remarque que les vagues des grandes marées ont contourné l’obstacle pour rogner jusqu’au chemin piétonnier qui n’existe plus entre Pen An Nen Nevez et Nantouar. Les clôtures des propriétés riveraines sont même sur le point de tomber.
NANTOUAR ET LE LENN : PARADIS DES OISEAUX D’EAU
Gilles Bentz, responsable de la station LPO (Ligue pour la Protection des Oiseaux) de l’Ile Grande (Pleumeur-Bodou) a aimablement répondu à nos questions. M. Bentz est, avec Pascal Provost le conservateur de la réserve naturelle des Sept-Iles, à la tête d’une équipe de huit salariés, de cinq volontaires en service civique et d’un grand nombre de bénévoles.
Pourquoi les sites de Nantouar et du Lenn en Louannec sont-ils fréquentés par autant d’espèces d’oiseaux ?
On a ici une offre intéressante avec le fond de la baie de Perros-Guirec. Cette unité fonctionnelle comprend d’une part une zone abritée propice au repos et d’autre part un estran vaste pour le nourrissage, ce qui est aussi le cas de la lagune du Lenn.
Je rencontre énormément de photographes animaliers sur ces sites. Ce mouvement a-t-il été initié par la LPO qui organise des journées de découverte ?
Je ne le pense pas. Ce site est connu et répertorié depuis longtemps. Ce phénomène s’est amplifié grâce à l’essor de la photo numérique. La dépense est moindre et on peut obtenir de meilleurs résultats en travaillant ensuite sur ordinateur. Ce qui n’était pas possible avec l’argentique. Ceci étant, la LPO a joué son rôle. Elle a participé au mouvement de sensibilisation générale, initié depuis plusieurs décennies, envers la nature et envers les oiseaux.
Pourquoi certains jours il n’y a pratiquement aucun oiseau et d’autres il y en a à foison ?
Ca dépend de la saison et de la marée. D’une façon générale, il y a moins d’oiseaux au printemps et en été qu’en automne et en hiver. Le rythme des oiseaux, ce n’est pas, comme pour nous, le jour et la nuit. C’est la marée haute et la marée basse puisque les oiseaux sont capables de détecter leur proie la nuit. A marée haute, la pointe du Kinn sert de reposoir.
Quelles sont les espèces les plus représentées ?
Toutes ces espèces ont une caractéristique commune : ce sont des oiseaux d’eau. On peut les sérier ainsi : canards et oies, petits échassiers, grands échassiers, cormorans, mouettes et goélands. On dénombre parfois, sur Le Lenn, jusqu’à mille bécasseaux variables tandis que les bernaches cravants
représentent une bande de 600 à 800 individus.
Sont-elles toutes des espèces d’oiseaux migrateurs ?
La plupart des oiseaux sont des migrateurs sauf le goéland argenté et le goéland marin. Le héron et l’aigrette garzette sont également présents toute l’année.
D’où viennent-elles ?
Les bernaches migrent vers la Sibérie. Les mouettes rieuses et les mouettes mélanocéphales migrent vers les pays de l’Europe de l’Est.
Pour vous, en tant qu’observateur, quelle est l’espèce qui a votre préférence ? Pourquoi ?
Difficile de donner une préférence à l’un ou à l’autre. On suit de près la bernache cravant. Ici comme aux Pays-Bas et en Grande Bretagne, on recense cette espèce tous les mois. On a de ce fait une idée précise de cette population. On observe que, malgré les mesures de protection prises dans les années 60, un couple de bernaches ne réussit sa reproduction qu’une année sur trois. L’oiseau souffre d’une perte d’énergie, dérangé
qu’il est par les activités de l’homme sur la côte et sur l’estran.
Un photographe me disait un jour : « Regardez cet oiseau. C’est un bruant des neiges, très rare ici ! » Y-a-t-il d’autres cas comme celui-là ?
Oui, c’est un oiseau rare mais il passe là régulièrement. Cette année, on a pu observer un canard appelé le garrot à l’oeil d’or, alors que l’an dernier, c’était une harelde boréale, deux canards nordiques. Il y a quelques années, on a vu une mouette de Franklin, venue d’Amérique du Nord.
Vous souvenez-vous que, dans les années 80 je crois, un couple de flamants roses avait hiberné sur le Lenn. Comment expliquez-vous ce qui peut être pris pour une anomalie ?
C’est sûr que ces flamants n’étaient pas dans leur zone géographique. Il y a tout le temps des oiseaux qui se perdent. Les navigateurs le savent bien, eux qui rencontrent un jour ou l’autre des passereaux et les voient
se poser sur leur embarcation au milieu de l’Atlantique !
Quelle est la tendance que vous observez. On se dirige vers davantage ou moins d’oiseaux surces sites dans les années à venir ?
Globalement, la tendance est au déclin. Les oiseaux de mer absorbent les mêmes pesticides et les mêmes poisons que les oiseaux qui vivent à l’intérieur des terres.
Que pensez-vous de l’initiative de ces écoliers et de leur professeur, Mme Malacarne, qui ont dressé un tableau informatif sur la flore et la faune du Lenn et de Kinn ?
Ce tableau qui se trouve en bord de route, face à la pointe du Kinn, est très bien fait et est tout-à-fait utile.
Y a-t-il d’autres réserves de ce type sur la côte trégorroise ?
Oui, la plupart des fonds de baie et les estuaires sont propices à l’accueil des oiseaux de rivage.
FACE A NOUS, L’ÎLE TOMÉ, SI PROCHE ET SI MYSTÉRIEUSE !
L’Ile Tomé qui se trouve en plein milieu de la Baie, ne fait pas partie de l’archipel des Sept-Iles…
Des écrivains l’ont décrite. Anatole Le Braz en parle de cette façon: « Une croupe de bête préhistorique, la queue mince, quasi rattachée encore au continent, la tête plus monstrueuse que le corps et tournée vers le large, telle est Tomé. On l’appelle en breton Tafeac. Un gazon foisonnant, roussi au vent de mer, lui fait un pelage fauve ».
Ernest Renan qui pouvait contempler Tomé depuis sa propriété de Rosmapamon, écrit : « Une sorte de Léviathan marin qui soulève à l’horizon sa rugueuse échine de granit. » Le Léviathan est un monstre aquatique mentionné dans la Bible.
Un temps fut, on a envisagé de la fortifier. Sans succès car « il faudrait d’assez grands déboursés ».
Cette île de 8 hectares est la propriété de l’abbaye de Bégard à partir du 12 ème siècle. Les moines se réservent le droit de chasse : il y a beaucoup de lapins. Elle a été affermée à plusieurs reprises au seigneur de Kergouanton, en Trélévern.
Les enfants de l’île fréquentaient l’école de Trélévern. Le curé Le Bourdonnec a procédé aux funérailles du dernier habitant de Tomé, M. Chosse, fils de Hyacinthe Chosse, fermier et terre-neuva. Sa femme seule exploitait la ferme avec sa fille et ses deux fils. Les bâtiments de la ferme ont été endommagés, en 1906, lors du torpillage de 3 navires marchands au large des Sept-Iles par le sous-marin allemand U-Boot 39.